Entretien de Daniel Dufour, secrétaire de l'Indecosa-CGT
"Il faut bloquer les prix"
Face à la hausse des prix, les associations de consommateurs sont de plus en plus offensives. Interview du secrétaire général de l'Indecosa-CGT du Rhône.
Pourquoi vous dénoncez la hausse des prix ?
Daniel Dufour : Parce que les prix ont vraiment flambé ces derniers mois. Ce que confirme 60 millions de consommateurs. Avec des hausses de 10 % sur certains produits en trois mois. Et des records pour le lait et les pâtes qui augmentent de plus de 40 %.
A Lyon, il y a une tendance spécifique ?
A Lyon, notamment dans le centre, les prix sont plus élevés car la grande distribution s'adapte aux revenus de ces clients. Et à Lyon, les revenus moyens sont plus élevés. Alors qu'en périphérie les prix sont moins élevés.
Mais les prix ont toujours augmenté !
Mais pas dans ces proportions. Et pas sur les produits de première nécessité comme le lait et les pâtes. Et ces hausses de prix interviennent dans un climat tendu. alors que les salaires ne progressent pas.
Les responsables de cette hausse des prix ?
Les industriels et des distributeurs qui s'entendent sur le dos des consommateurs. L'objectif étant de réaliser un maximum de profits pour satisfaire leurs actionnaires. Les distributeurs s'entendent sur les prix. Ils ne sont que 5, se connaissent tous...
Mais certains distributeurs comme Leclerc se battent pour faire baisser les prix !
C'est n'importe quoi ! D'un côté ces distributeurs ne vendent plus certains produits pour se faire de la publicité et en même temps ils augmentent les prix d'autres produits où ils font plus de marges. D'ailleurs la rentabilité de la grande distribution n'a jamais été aussi élevée. Comme celle des grands groupes industriels.
Mais les industriels invoquent la hausse du prix des matières premières !
C'est vrai que le cours du lait flambe, comme celui du blé. Le problème, c'est qu'il n'y a aucune transparence sur les prix de revient de ces industriels. Donc on ne peut pas vérifier ce qu'ils disent ! Ce qui leur permet de cacher un certain nombre d'abus. d'ailleurs, la Répression des fraudes vient de lancer une enquête auprès des industriels, notamment dans le département, pour en savoir plus. Mais là encore sans avoir suffisamment de moyens.
Et les agriculteurs ?
C'est facile d'accuser les agriculteurs comme le font les industriels de l'agroalimentaire et la grande distribution. Les petits producteurs sont payés une misère. D'ailleurs, le prix du jambon augmente mais le revenu des producteurs de porc baisse ! Et les intermédiaires gagnent beaucoup d'argent !
Ce que vous proposez pour freiner cette hausse des prix ?
Il faut bloquer les prix des produits de première nécessité : alimentation, énergie et transports. Avec une baisse de la TVA. Et instaurer une autorité de contrôle des prix. On a aujourd'hui 20.000 dossiers de surendettement dans le département. Et ça risque d'augmenter. Surtout quand on voit que les grandes surfaces généralisent leurs cartes d'achat à crédit qui permettent de différer le paiement des achats. Les consommateurs sont pris au piège. Et on va vers un clash social. Surtout que des hausses de prix sont encore annoncées pour les prochains mois. Il faut donc prendre des mesures radicales si on veut éviter que ça explose.
Source : Lyon Mag, Mars 2008, p.83